3.14.2023

Emporté par la foule

En voyant la foule, l’on peut éculer les procédés. Dans le métro, dans la rue, là, lors d’un lotto à grande échelle, dans un stade, on peut se permettre des mises au point grossières. Et, des nouvelles foules invisibles, celles des écrans, on peut se permettre un grain faible, des pixels de Samsung. On peut parfaitement utiliser une machine de prise de vue pauvre, un matériel de montage gratuit, donc pauvre. Alors j’écule les procédés. Arrêt sur image, ralenti, accélération, superposition. Etre grossier en cinéma, comme elle est, la foule, grossière en société. Etre facile comme elle est facile. Je peux juste en vouloir un tout petit peu plus face à elle qui ne voudra jamais moins. Je vais la montrer en cinéma, en mouvement, elle qui est l’effet et la cause de tous nos statismes. Oui, il faut que tout change pour que rien ne change. La foule en est le garant. Si nos drames sont les mêmes que ceux d’Homère, c’est parce qu’elle est, dans la tragédie, et la scène et le destin. Le chemin de la foule est large, long et s’intrique en lui-même. Pour ceux et celles qui ont un petit peu d’amour du monde, n’y reste qu’une rime ou deux sur les paysages des catastrophes. Un peu de formes, dans un monde sans fond. Le chemin est fait pour la foule. Il est droit. Le route est promise, comme la bonne parole. Les oeillères de la foule sont les ornières de notre chemin.

 

Après avoir achevé la littérature et la musique, la peinture, on aurait pu croire au cinéma. Avec la couleur et le son, on aurait pu imaginer que cet art mineur réussirait à instiguer suffisamment de réalité dans la banalité, de compassion dans la bêtise et dans l’horreur pour que cette foule sache se détacher de ses lâchetés quotidiennes et trouve, dans sa médiocrité, un tout petit peu de courage pour que ses enfants traversent des cauchemars moins atroces que ses parents. Alors autant garder le noir et blanc, pour la défaite de l’image et du mot. Cette foule qui ne veut pas se voir, on ne peut la filmer qu’au rayon x. Avec l’image, on ne peut plus rien espérer. Game over. La foule est sevrée. Elle attend des exécutions en direct. Mais, comme je l’ai dit, elle l’était déjà avant l’image. Paul le savait et le “Dit du Genji” ne parle que d’amour.

 

La foule est une fête. De la cochonnaille, un tire-pipe, des familles nombreuses. Ce que ce monde pousse à l’obscène, c’est le simple fait de vivre. La mythologie du guerrier est inversée. Chaque strate de ton quotidien fait de toi, le meilleur soldat de la pseudo-joie. Ceux et celles qui jouissent de toi, du bois mort que tu es, fonde sur tes limons leurs nouvelles Venise. On pourrait dire que tu es bête, même, que tu es une bête. C’est juste lire, dans la vie une vision du séparé. Une énième vision du séparé. Tu n’es ni bête, ni une bête. Tu es juste lâche. Seul. Et lâche. Et ainsi, foule. Oui, la foule est la fête foraine. Le terrain vague avant. Le tire-pipe. Les ballons. Et le terrain vague après. Et la mort, c’est ainsi. Elle est mille fois ressuscitée. Nous sommes juste son horreur. La mort, il faut juste la laisser tranquille. La vie aussi.

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

11.15.2017

Emeute! Merci Vranken, premier ministre de la belgique.



Emeute.
La meute ex, hors, la meute sort.
La meute brune.
Brune des mots de Vranken?
Non. Brune maghreb.
La meute maghreb qui terrorise les lecteurs du Soir qui se rapproche tant de ceux/celles de la DH parce qu'une ou deux vitrines ont fait crich-cling et qu'une ou deux voitures ont fait clang-crac.

Brune la meute de mots de Vranken qui sourit au Soudan et trouve la Lybie des marchés d'esclaves si safe et secure pour renvoyer/contenir celles et ceux qui fuient les zones de guerre
qu'on adore tant puisqu'on aime payer si peu nos gsm, nos laptop, notre essence, nos Tout.

Emeute.
La meute qui sort, fuit ses capitaux dans des paradis que Charle Michel, Micron, Merkel, May,... jubilent de ne rien faire d'autre que de taxer pire les sous-classe et déréguler les codes de travail, en salant les pensions et augmentant l'age de la retraite.
Cette meute qui sort, qui s'émeute sa classe ne semble pas déranger les lecteurs du soir, de la Libre, de Libération, du Figaro, du Monde, de....

Emeute... On rigole.

Tu sais ce que c'est qu'une émeute?


On ne devrait laisser l'accès au commentaires des murs de presse qu'à celles et ceux qui ont lu au minimum, un livre d'histoire, de sociologie, d'économie et de philosophie. Et encore....








11.10.2017

Song's lyrics/ 2000




All words of the 50's are all right
All words of the 60's are all right
All words of the 70's are all right
All words of the 80's are all right
All words of the 90's are all right


But where are the words of 2000?
Or 2010?


All words of the 50's are all right
All words of the 60's are all right
All words of the 70's are all right
All words of the 80's are all right
All words of the 90's are all right


Hem... A Ya... there was Britney Spears...
And... Oh Ya... Eminem...


All words of the 50's are all right
All words of the 60's are all right
All words of the 70's are all right
All words of the 80's are all right
All words of the 90's are all right


Hem... 2000... Let me remember...
Sorry... I gonna find one....


All words of the 50's are all right
All words of the 60's are all right
All words of the 70's are all right
All words of the 80's are all right
All words of the 90's are all right


 They had to be someone....
But I can't get it....



All words of the 50's are all right
All words of the 60's are all right
All words of the 70's are all right
All words of the 80's are all right
All words of the 90's are all right



















11.06.2017

L'affaire Weinstein et l'Iphone x (plus quelques mains congolaises coupées) / Début sur l'obscène








L’obscène. Mon ami le Goulven me demande d’y penser. Il parle de l’ob-scène. Ce qui est hors de la scène, derrière la scène, sous la scène. Commençons.


L’obscène de ton beef burger, ce sont les sols secs de Californie
L’obscène de ta douche dans un 4 étoile de LA, ce sont les creeks à sec de Californie
L’obscène de ton dernier Samsung Galaxie, ce sont les 12h sans pause des gamins dans les mines de cobalt.
L’obscène de ton Iphone, ce sont les dortoires des ouvriers des usines chinoises
L’obscène de ton bain chaud, ce sont les déchets d’uranium stockés où déjà?
L’obscène de ta chemise Zara, ce sont les ateliers qui s’effondrent sur les ouvriers au Bangladesh
L’obscène de ton vote Michel, ce sont les les milliards des Panama Paper
L’obscène de ton vote Michel, ce sont les rafles à la gare du nord.
L’obscène de ton vote Macron, c’est la fin de tes droits de travailleurs
L’obscène de ta jupiler, ce sont les 0% d’impôt payé par AB Inbev
L’obscène de ta mère, c’est ta naissance comme participant du monde
L’obscène de ton voyage à Beijing, ce sont les chiens découpés vivants
L’obscène de ton vol sur Turkish airlines, ce sont les expulsions de Soudanais
L’obscène de ton vol Ryan air, ce sont les 800€ par mois des stewards et stewardess payé à la fermeture des portes de ton avion
L’obscène de ton pull en cachemir, c’est le cri de l’animal dépecé vivant
L’obscène du livre que tu lis, ce sont les x% payé à l’écrivain
L’obscène de ton boudin chez Lidl, c’est le salaire de l’employé(e) qui te sourit
L’obscène de ton verre de lait, c’est le suicide du producteur qui reçoit x sur le prix que tu paies
L’obscène de ton sirop pour la toux, c’est l’ouvrier grippé qui fait ton mélange sur la chaîne de montage
L’obscène de ton filet de perche, ce sont les 12 heures de travail du pécheur levé à 3h du matin.
L’obscène de ton plan cul, ce sont les 54 likes de ta semaine sur Tinder
L’obscène de ton rail de coke, ce sont les mules crevée ou en tôle

L’obscène de ton 16e arrondissement, ce sont 40 ans d’exclusion en Seine-St-Denis
L’obscène de ta banlieue, c’est le manteau sur le chien des putes de la télé réalité
L’obscène de ta voiture, c’est l’air que tu respires
L’obscène de demain, c’est hier
L’obscène de ton jogging, c’est l’air que tu respires
L’obscène de ton confort, c’est ton contrat de travail
L’obscène de ton désir, c’est ton ennui
L’obscène de la sirène de flic, c’est ton impossibilité à vivre avec les autres
L’obscène de ta colère, c’est ton impossibilité à vivre avec les autres
L’obscène de ton aigreur, c’est ta peur
L’obscène de ta Leffe, c’est qu’elle appartient à AB Inbev
L’obscène de ton poulet, ton boeuf, ton veau à si peu d’euro le kilo, c’est Auschwitz
L’obscène de ton électricité française, c’est le soldat crevé en Centre-Afrique qui pensait se battre contre le terrorisme
L’obscène de ton premier rendez-vous, c’est la sueur de tes aisselles
L’obscène de l’agriculture, c’est l’enclos
L’obscène de ta ville, c’est la sédentarisation
L’obscène de ton présent, c’est l’histoire
L’obscène de ton café, ton riz, ton thé, ... ce sont les 1€6 par jour de celui qui cultive ta terre
L’obscène de ta fatigue, c’est le contrat que tu as signé
L’obscène de ta séparation, c’est la vie que tu ne voulais pas abandonné
L’obscène de ta séparation, c’est le langage que tu n’as pas appris
L’obscène du rien, c’est le désespoir de l’offre
L’obscène de la demande, c’est ton besoin
L’obscène de Marc Lévy, c’est ta niaiserie
L’obscène de l’Europe, ce n’est plus la deuxième guerre mondiale
L’obscène de l’âge de ta retraite, c’est le réfugié dont tu acceptes l’expulsion
L’obscène de midi, c’est le soleil qui a bien voulu se lever
L’obscène de ton haleine, c’est ce que tu as mangé les dernières années
L’obscène du sexe, c’est aussi ton manque
L’obscène du poisson que tu manges, c’est lui nageant
L’obscène du sourire que tu offres alors que tu ne veux pas sourire, c’est le code qui te demande de le faire
....








La liste à continuer. A détailler. La liste à en faire une image de ce qui n’est pas immédiatement ce qui est.
Comment faire?
Cataloguer. Et pour chaque objet jusqu’à chaque geste, la chaîne qui le fait être et, dans la longueur de la chaîne, la disparition de sa naissance.
Ou. A se demander, non ce qui obscène. Ce ne serait qu’un long travelling de trois heures, trois jours, montrant. Tout.
En réfléchissant à la question de l’obscène, je me suis demandé à chaque objet vu (un Iphone, une veste Zara,...), chaque bâtiment vu (le cinquantenaire, les bureaux d’Umicore, le chantier du nouveau BNP, ta maison,...) chaque geste vu (une main dans les cheveux, des pieds qui traînent, la vapeur d’une cigarette électronique,...) quel était son obscène.
Quel était l’obscène de nos banalités.
Et sans préavis d’une obscène nécessairement négatif, immanquablement sale.
L’obscène, c’est le vertige.
Synchronique d’un système de production-consommation quasi immédiat et, en général, ignare de la mine de cobalt au téléchargement d’une app, ignare de la chaire rose du veau qui mijote après le cellophane au conditionnement des fermes-usines.
Diachronique de la poignée de main, de la main au cul, de la main coupée du caoutchouc qui se prélasse l’été sur l’herbe du cinquentenaire ou du recyclage de l’Union minière dans le recyclage, de la Stadt des KdF-Wagens au Dieselgate de VW.
L’obscène c’est le vertige de l’oubli conscient. Le vertige du confort, alors le vertige de la peur.
Le vertige de ne pouvoir rien être si la conséquence doit s’en chercher une cause.
L’obscène c’est le vertige de la scène sans conséquence.






















10.28.2017

Balance ton porc (pore-port) et la Catalogne.






Requiem de Faure. Tapis de feuilles, Catalogne et robot-citoyen en Arabie saoudite. Les nouvelles frontières, l'intemporel et l'éternel retour de l'impermanent.

Sirène de police dans un quartier tranquille, fil d'actualités et grammaire inclusive.

Balance ton porc, ton pore, ton port.

Nouvelles frontières.

Frontières.

Les académiciens.ennes trouvent le péril, mortel.

Catalogne. Kurdistan. Flandre. Un robot.

L'espace ouvert de facebook. L'espace de langues ouvertes de la routes. L'espace de langues sur ma bite et mon con.
L'espace ouvert de la route 66 entre les frontières des législations. Ici je te pends. Ici je te fusille. Ici, je suis humain et tu passeras ta vie dans 4m2. Ici tu fumes. Ici tu te maries avec autant de femmes mormonnes que tu veux. Ici tu fais ce que tu ne fais pas ici.

Ici, c'est mon nulle part.


Un robot citoyen. Une femmebot. Un jouet. Une machine à laver. Une identité. Des droits.

Catalogne. Une identité.

#J'aimemonporc.

Mon identité. Dans l'impermanence.


Pore : zone de transit.
Port : zone de transit.

Porc : Tout est bon.


Nous ne nous parlons pas. Nous parlons à la machine qui nous aime parce qu'elle nous laisse parler (écrire-critiquer-statuer-chier-dénoncer-aimer). Nous la faisons citoyenne. Dans la zone de transit du virtuel, nous voguons nos mirages. La réalité constipée.

Zone de transit. Les barbelés de l'identité.

Nouvelles frontières.

Exclusives.

Le monde ouvert se confine pour un dialogue du conflit.

Indépendance. Réduction du "nous" au "je".

Ce n'est pas une question d'individualité. C'est une question d'identité.

Et l'identité n'existe pas. Tout est impermanent.

Vers une grammaire du 21e Siècle. Français. Supprimer le verbe "être". Il ne crée que des troubles sémantiques majeurs.

Rien n'est.
Tout naît.


















5.13.2017

Fiction ou vie nue










Je ne sais pas trop comment tout cela se passe. Je ne sais pas tellement comment me souvenir, ni d’où ça vient, ni si c’est vraiment vrai. Je décide que c’est vraiment vrai. Je ne sais pas encore pourquoi je décide que c’est vraiment vrai, parce que je ne sais pas encore exactement à quoi tout cela peut bien servir.
J’étais couché dans ma salle de bain, il y a quelques minutes encore, parce que je fais toujours la sieste dans la salle de bain et ce, depuis mes 11-12 ans, à tel point que la taille de la salle de bain a toujours été un critère important dans le choix de mes lieux de vie. J’ai bien essayé de m’en défaire durant les quatre année où j’ai vécu au 10 bis un des derniers squats qui n’a toujours pas été fermé à Genève, puis durnt les trois années que j’ai passé à vivre à l’hôtel le Gai-Rivage, par intermittence, à Rolle, tenu à l’époque par Emma Pittier, femme de Pittier, un salaud notoire qui prostituait sa fille, possédait deux doberman et avait un flingue sous sa stammtisch et qui était déjà mort quand j’y ai emménagé. La c’était plus simple, je n’avais tout simplement pas de salle de bain mais un évier dans la chambre.
J’étais donc couché dans ma salle de bain, enfin ce qui est encore ma salle de bain et ce, jusqu’à quand, je n’en sais trop rien, mais tout cela est une autre histoire et, là, je n’étais pas en train de faire la sieste, mais prolongé la grasse matinée que je n’ai jamais été capable de faire dans mon lit. Je commence chaque journée sur un tapis de sol, couché avec un livre en général et le sèche-cheveux ou le déshumidificateur, enfin un bruit récurrent et ronronnant et parfois je me rendors ou je somnole et quand je somnole, je cogite ou plutôt je pense ou plutôt je laisse venir des pensées et, ce matin, il y e encore quelques minutes, j’ai vu des images que j’avais vécues ces derniers mois.
Alors, elles, ces images, je sais qu’elles sont vraies. Mais comme d’habitude, elles viennent par bribes. Ce sont précisément des images parce que je suis incpable de me souvenir en cinéma mais toujours en photographie et, sans son. J’imagine ce qui a été dit mais je ne m’en rappelle jamais précisément, ce qui fait que, j’ai pas d’autre choix que d’interpréter et le déroulé des événements et leurs contenus ce qui permet à ma mère, parce exemple, de me dire que j’invente certains souvenirs. Lorsque j’en évoque d’autres, partagés avec des amis, la famille, des femmes, je me trouve alors face à leurs déroulés et leurs interprétations, ce qui, au final, nous donne une intersection plus ou moins vague pour une vie plus ou moins commune.
Quand je descends en Italie et, passé Livourne, vers La California, avant Cecina et que j’ouvre la fenêtre de la voiture ou du train, l’odeur des pins malgré le dioxyde de la SS1 me fait du bien, m’apaise je pourrais même dire. Je vais dans cette région depuis que je suis dans le ventre de ma mère, je crois donc que cette odeur est une odeur qui vient de loin, non pas la première de ma vie mais la première à se fixer et, même si je suis parfaitement incapable, lorsque je suis à Bruxelles, d’avoir cette odeur dans ma tête, elle revient quand je suis en Toscane et alors, ce souvenir, pratiquement, ne me sert à rien, puisqu’il ne me suffit que de continuer à aimer l’odeur des pins pour en ressentir la joie.
Dans la salle de bain, je pensais à une fille avec qui j’avais couché dernièrement. Je ne me remémorais pas le moment exact, mais j’utilisais les souvenirs de son appartement et de son corps pour créer un scénario érogène un peu pauvre mais fonctionnel. Je dis pauvre et fonctionnel parce que ce scénario n’aurait rien eu d’équivalent à l’effort que j’aurais pu mener pour simplement revoir cette fille et vivre une réalité qui aurait été bien plus enrichissante que ce suffisant couché sur un tapis de sol dans une journée grise comme il faut pour écrire un texte sur la fiction et la vie nue. Je me suis donc retrouvé, en pensée, via ma mémoire dans l’appartement de cette fille, sur son canapé quand d’autres images sont apparues, comme celle de mon ex-femme me demandant de garder les yeux ouverts pour éviter de penser à une autre ou, toujours elle, me racontant des trucs désagréables dans la cuisine où j’écris actuellement ou des images de moi, ivre, en train de gueuler sur sa meilleure amie au mariage de la soeur de celle-ci.
Bref. Je disais, en commençant ce travail, que je ne savais pas tant l’utilité de se souvenir, de l’utilité du souvenir, d’autant plus, si nous n’avons pas la mémoire adéquate pour, au moins, garder un film et un film parlant. Je ne le sais pas. Je ne sais d’ailleurs pas non à quoi cela sert d’avoir des perspectives, des plans, des rêves. Mais pour le passé, en revenant à l’exemple de mes flashs salle-de-bainiques, le souvenir agréable allait me conduire à un à peine suffisant plutôt minable et les souvenirs désagréables ont annihilé cette possibilité.
A quoi donc me servent le son de cette balle de basket sur le playground aménagé dans le jardin de la maison où vivait ma grand-mère et ma tante qui n’est pas sortie de sa maison pendant 17 ans ou le cling des bouteilles de l’usine à vin Schenk sise à Rolle? J’ai travaillé dans d’autres usines, je sors peu de chez moi, si ce n’est pour aller travailler. A quoi me sert le froid dur du crâne de mon père mort dans le funérarium de Nyon?
Le texte que je suis en train d’écrire, le roman dans le cadre des ateliers des écritures contemporaines foisonne de choses, d’éléments et d’événements qui me sont, d’une certaines manières, relatifs à l’interprétation que je suis en mesure d’en faire. L’odeur de mon père, je ne m’en rappelle pas. Je sais qu’elle était désagréable. J’ai des photos dans ma tête de mon père, quasi nu, la sonde pendant de sa queue et qui me souriait comme par défaut. J’ai tiré avec plusieurs armes différentes. Je sais ce que cela fait de tirer, de sentir le poids, la puissance, la mort possible et la terreur et l’excitation que cela produit. Je sais l’odeur de la cordite. Je sais ce que c’est que de penser aimer, de se faire une idée et une représentation de l’amour et d’essayer de vivre cette idée et l’échec évident qui conclut tout rêve réalisé ou, plutôt, semi-réalisé. Par contre, les chapitres où je décris l’enfance de mon père, sa désertion, ses années au goulag, 1956, les chapitres où je prends son “je”, sont clairement fictionnels tout en étant, je l’espère, plausibles.
Le sujet de ce travail est exactement un des sujets principaux de mon roman. En remplissant les colonnes, la vie nue se noircissait alors que la fiction restait vide. Tout semblait simple. Et plus je noircissais, plus il me semblait évident que je ne savais rien réellement à propos des éléments que j’introduisais. Ils remplissaient sur la page le même espace qu’ils remplissaient dans mon cerveau. Et pour quelle chierie de raison? Pourquoi garder des entrepôts qui ne livrent que du matériels parcellaires et défectueux?
Je ne résouds rien de ces questions. Même la fiction, le texte que j’écris ne résoud rien de ces questions. Ni la fiction, ni la mémoire ne me résolvent.
Mais on continuera quand même.




















4.12.2017

Brûler Bruges?








Du vase clos à la transversalité, de Janus au tête-à-tête, de la séparation à la solution homogène, la question s’est étirée et s’est affinée des monologues s’opposant au dialogue qui s’est précisé entre les Corps jusqu’à une hybridité qui, à force de s’amalgamer, se condense jusqu’à s’obscurcir un discours où le Je multiplié dans tant de Narcisses, ne voit plus la mare qui s’assêche, pas plus que les traits qui s’opaquent.
Du glissement historique du “il” ou du “eux” au “je”, de la parole et du geste sans histoire pour l’Histoire, du “je” qui prend conscience de l’autre “je” pour se résonner en “tu”, de ce vague “nous” où le collectif ne s’est proposé, via la critique, que pour s’entre-appuyer ses “je”, où des Salons aux journeaux, des galeries aux revues, la multiplications des canaux nous donne à voir une interaction qui rappelle, à la fois Bruge et la sous-utilisation des réseaux fluviaux et interfluviaux en Belgique. L’image, évidemment ne se réduit pas au Plat-Pays.
Bruges ne se vit pas et se voit à peine. Bruges idéal dans son dialogue à elle-même, splendeur et richesse auto-centrée qu’on prend en photo (mal), que l’on voit (à peine) et que l’on ne regarde plus vraiment. Pire encore, devant la masse ennuyée qui engrosse les ruelles, l’historien de l’art ou l’amateur éclairé, n’a plus que la pleine nuit pour apprécier les finesses de l’architecture.
Sur les réseaux fluviaux ne passent que de maigres et rares transporteurs. Maigres parce que la profondeur ne suffit pas à dépasser les 4000 tonnes, rares, parce que la vitesse et la puissance du carburant abondant (encore), monopolistique et les lobbys de l’asphalte qui semble plus lisse que l’eau, préfèrent au Bateliers ou aux Atalantes, les longues processions des 40 tonnes.
Dans les années septantes, les multiples courants de l’autonomie italienne posaient sur le discours du “nous” échoué celle du personnel. L’art conceptuel avait déjà résolu, dépassé et achevé le problème 10 ans avant. Cattelan, né dans une des villes les plus actives de ces années-là, pousse jusqu’au plus concret, l’effondrement du “je” et de son solliloque vers son absence, stade pré-ultime de son aliénation avant le vide dans la création de sa “wrong gallery”. Fermé pour cause de fermeture comme si Bruge murait ses portes.
Du “je” affirmé, stirnerien, vers un dialogue au “nous” plus stirnerien encore, “nous” d’un miroir sans teint, grahamien, le “je” exposé, dans son unicité rayonnante, dans un premier temps, s’implose dans la seconde moitié du XXe siècle, pour se reconstituer mais compartimenté, séparé dans un fordisme de l’identité qu’illustre, par exemple, Dan Graham, multipliant les médias (photographie, performance, installation,...), se dialoguant en méta (théorie, critique), transmettant, par la création d’une galerie, s’ouvrant donc, mais dans un vase clos. La porosité s’incarne dans un corps unique. Oui, il y aurait les sorties dans l’espace publique, lumineux et transparent, une volonté de se décentrer, un désir de périphérie, mais il s’agit toujours de ce “je” multiple, ce ‘je” qui s’implose dans l’art conceptuel depuis 40 ans et ravale ses façades comme on rénove celle de Bruge, mais qui ne sait surgir, exploser et se répandre, écouler, non un discours, non un “nous” ni même un “tu” mais un “vous”.
 “Je” est un autre englobé dans un “je” plus grand qui tendrait à se condenser et l’être moderne de l’artiste-écrivain est cette condensation qui s’écoule des vitres des oeuvres de Graham, en autres, à l’intérieur, toujours plus loin, plus profondément. Bruges ne s’enfonce pas dans sa lagune. Elle se consolide, dans un aménagement du territoire où son centre (le marché) se compose très bien des rues adjacentes (galeries Alaia), des ruelles plus cachées (Sternberg press), des vitrines clinquantes (Rizzoli) et des surfaces grand publique (Phaidon).

Une économie intégrée, rationnelle, en adéquation parfaite avec l’économie intégrée, rationnelle capitaliste. Un monde fonctionnel dans les mondes fonctionnels, non pas parallèle à eux mais amoureusement interconnecté et interagissant. Un art froid, aliéné et aliénant dans un monde globalisé aliéné et aliénant. Le politique présent de trop d’absence s’est fondu dans l’économique qui n’a, depuis longtemps, plus qu’un seul et même jeu à jouer. Et ce tout aussi hallucinamment et lascivement fade qu’effroyablement ultra-violent, tellement omniprésent et omnipotent qu’il s’en efface des consciences de Bruges. La production s’ammasse, se multiplie dans un même qui, plus que banaliser un discours, le nullifie à tel point qu’il n’y aurait même plus de spectacle à critiquer, tant la mise en abyme n’a laissé que de l’abyme, fascinant, évidemment à tout point de vue dès lors que nous voulions bien y descendre en bathyscaphe s’émerveiller de la nuit, du froid et des monstres. Revues, galeries, critiques, l’ombilic est une bonde qui ne finit pas de se vider. Certes, la recherche induite creuse, détaille, précise, mais c’est la méthode de la sécante où son algorythme de recherche tend au zéro de la fonction.
Alors l’Art et la Littérature se sont unies et solidifiée dans une forme totale du séparé tant à l’intérieur du biotope de la création que dans son mouvement vers l’extérieur. Reprenons. L'objet a pensé l'image. Le mot a pensé l'objet. L'objet seul. L'objet mis en scène. Le mot mis en scène. Le mot a pensé l'action. L'action s'est pensée toute seule. L'image, l'objet et le mot dansent. Le rien est devenu tout.
Hors Bruges, le réseaux des canaux, 41 pour la Belgique, reliant les fleuves aux fleuves et les villes aux villes au fond trop bas pour les bathyscaphes.
La nouvelle classe (les ouvriers, les employés précaires, les stagiaires, les chômeurs, les intermittents, les réfugiés, les sdf et les working poors) et les classes médianes (l'ancienne classe moyenne) ne veulent globalement pas d'art, ils veulent du divertissement.
L'élite (les universitaires riches et pauvres, les artistes riches ou pauvres, la upper class, les nouveaux riches, les héritiers) ne veut globalement pas d'art mais des vernissages.
Les artistes dans le mood ne veulent pas d'art, ils veulent du cul.
Les artistes du dimanche font. Mais on s'en fout parce qu'ils ne posent pas de question.
Jeff Koons bien entendu le comprends qui dit « l’art n’exige rien de vous, il attend et vous transforme » et son alliage d’acier sonnant et trébuchant avec Vuitton, manifeste à la fois a- et overpolitique, splendifie au centuple, le séparé totalement intégré, immensément concentré et concerné, détaché, ludique et victorieux.

Certes, il n’est qu’heureux que par la forme il ne soit plus possible de considérer d'art séparé comme il n'y a pas d'existence séparée. Ce que l’écrit vient chercher dans l’art et réciproquement, ce dialogue est une joie. D’ailleurs monter un film c'est de la musique. Filmer une scène, c’est de la photographie et de la chorégraphie. Peindre c'est lire l'image. Photographier c'est peindre, en musique. Ecrire c'est aussi tout que le tout qu'est le cinéma.
C’est la question de se poser la question, de lui donner de l’importance qui n’a de raison d’être que pour Bruges mais dont les canaux qui traversent le monde ne peuvent rien faire et n’en ont, d’ailleurs, rien à faire.
C’est la question d’aujourd’hui. Dans l’académisme de l’art conceptuel, faut-il une réaction ?
Ce que Koons propose c’est un sofa, une terrasse chauffée sur la grande place. Ce que Lawrence Weiner proposait, dans l’action que je considère comme étant la plus spécifique de rapprochement entre art et littérature en statuant : « - 1. L'artiste peut construire le travail - 2. Le travail peut être fabriqué - 3. Le travail peut ne pas être réalisé - Chaque proposition étant égale et en accord avec l'intention de l'artiste le choix d'une des conditions de présentation relève du récepteur à l'occasion de la réception » et plus particulièrement dans « Statements » c’est le dialogue direct par une œuvre à la fois achevée et en gestation possible. Ni transparence, ni pose, ni éclat. « Statements » représente justement ce que j’image par les 41 canaux qui traversent la Belgique.
Alors faut-il brûler Bruges ?
Bien sûr que non. Bruges vaut pour elle même et il est tout à fait possible de ne simplement pas y aller.
Ce qui est impossible, c’est de ne rien faire. Et non plus de partir d’une unité pour la séparé, mais de concevoir le séparé comme une donnée à réunifier et de proposer cette réunification, non pas comme une attente, mais une exigence du « je » vers une exigence du « vous », préalable à ce « nous » qui serait bon de retrouver.